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Et la lumière fut : entretien avec Marc Galerne, fondateur de K5600

28 Nov 2022

Marc Galerne, fondateur de K5600 ©DR

Co-fondateur de la société K5600 spécialisée dans la fabrication de projecteurs d’éclairage, Marc Galerne revient pour la CST sur l’histoire de cette société qui a vu passer nombre de révolutions cinématographiques.

Pourriez-vous nous raconter l’histoire de K5600 ?

Marc Galerne : J’ai grandi dans ce métier. Mon père, Jean Galerne, était un passionné d’image et tournait tous ses films de vacances en 16 mm. Il a été directeur général et surtout l’inventeur de beaucoup de projecteurs de LTM. En 1972, Il a mis au point les premiers ballasts pour les lampes HMI. J’ai donc baigné dans cette ambiance très tôt. En 1977 j’ai travaillé un an chez Lee Filters, le célèbre fabricant de gélatine en Angleterre avant de rejoindre LTM en tant que commercial export, puis je me suis occupé du marketing avant de diriger les studios de la Victorine à Nice de 1986 à 1992 date à laquelle nous avons créé K5600 Lighting avec mon père et mon frère Gilles Galerne qui était basé à Los Angeles. Mon père est décédé un an après la création de la société. La société, endettée, a démarré avec deux projecteurs qu’il avait conçus.

Quels étaient vos produits phares lorsque vous avez démarré la société ?

M.G. : Le Joker 200 et le Joker 400 étaient nos produits phares lors du lancement. Il s’agissait de projecteurs de type PAR d’encombrement réduit et proposés dans des Flycases. La lampe MSR 400w était une première chez Philips, qui présentait l’avantage d’utiliser une douille de taille très réduite en comparaison aux G22 utilisées par les 575 sur le marché. Le fait d’être conditionnés dans des valises a sûrement été un atout majeur à une époque où les tournages de séries TV commençaient à se multiplier.

Au décès de notre père, mon frère et moi étions attendus car c’était lui qui inventait les appareils. S’inspirant des têtes de flash pour la photo, j’ai conçu le Bug, une source à 360 degrés dont la lampe est recouverte d’un globe de protection UV en borosilicate. C’était le moment où les boîtes à lumière et les boules chinoises commençaient à être très prisées sur les tournages avec des lampes à incandescence de puissances et surtout de rendements faibles. La gamme des Bugs a apporté un éclairement accru, surtout en lumière du jour. Nous avons ensuite créé le Joker-Bug qui était un Bug qui devenait un Par grâce au Beamer, un accessoire Par. La gamme s’est étendue au 800 et au 1 600 W. L’adaptateur Bug A Beam qui reçoit un Source 4 (découpe peu onéreuse) sur les Joker 400, 800 et maintenant 1 600 est sans discussion l’accessoire phare.

Nous avons par la suite développé la gamme Alpha, des appareils de type Fresnel ayant la particularité de pouvoir travailler en douche y compris en 18 kW. Grâce à un réflecteur en fibre de quartz que nous avons développé, nous avons pu également diminuer de manière significative la profondeur des appareils sans modifier la plage de focalisation. Ainsi l’Alpha 18 kW est le seul de cette puissance à passer les portes. Nous avons aussi ajouté la possibilité de retirer la lentille de Fresnel permettant ainsi de créer des ombres portées très nettes. Une pratique qui se faisait auparavant sur les tournages, non sans risques de brûlures aux UV.

En tant que fabricant de projecteurs, à quelles problématiques avez-vous dû faire face ?

M.G. : Au début nous avons dû nous faire un nom. Le fabricant français de référence était LTM dont nous étions tous issus. Nous avons à l’époque subi des attaques directes de la part de sa nouvelle direction allant de la diffamation auprès de nos clients à des pressions sur des fournisseurs communs qui étaient menacés de ne plus travailler avec la grande société que LTM était encore à l’époque. Ce qui n’a pas empêché quelques années plus tard la chute de LTM. La fabrication est un processus de plus en plus difficile et peu rémunérateur lorsqu’on le fait avec passion et sans un groupe financier derrière soi. Les profits investis dans les nouveaux produits ne le sont pas sans limiter le budget marketing. La problématique a évolué avec les nouveaux enjeux, qu’ils soient technologiques, économiques, écologiques et sanitaires.

L’arrivée des Leds a vu une pléthore de nouvelles sociétés pousser dans le monde entier. La Chine en est le grand vainqueur lorsqu’elle ne vend pas un produit, elle en est fournisseur, voire fabricant sous-traitant. La rétention des composants pénalise aussi les fabricants occidentaux. L’économie des tournages a engendré de nouveaux outils pas chers et jetables. L’écologie est détournée pour devenir un argument commercial qui est très discutable. Quant au sanitaire, une pandémie telle que nous l’avons vécue a affaibli des petites structures comme la nôtre. En effet lorsque les ventes s’arrêtent nettes, le stock à l’instant T est composé de produits finis, mais aussi de plus de la moitié de pièces qui ne sont pas vendables seules et qu’il faut pourtant payer aux fournisseurs. C’est comme cela que nous avons été contraints de souscrire un PGE de 350 000 € qu’il faut rembourser aujourd’hui.

Les chefs opérateurs vous font confiance depuis plus de trente ans, comment expliquez-vous cette relation qui perdure ?

M. G. : Plusieurs raisons à cela peuvent être invoquées, mais la plus importante est la cohérence des appareils que nous produisons. Nous sommes des artisans qui concevons des outils pour des utilisations précises, même lorsqu’elles sont variées comme avec les Jokers qui sont polyvalents…

Pour lire la suite, téléchargez la Lettre 182 et consultez la page 30.

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