Comment êtes-vous arrivée à intégrer le collectif Femmes à la Caméra ?
J’ai été appelée au téléphone par les Inrocks au printemps 2018, et ils m’ont demandé si j’avais subi du harcèlement dans ma vie professionnelle. Ce à quoi j’ai répondu que non. Mais
trois minutes après avoir raccroché je me suis rendu compte que oui. La question étant un peu directe, je n’ai pas réalisé, simplement parce que je n’en avais pas pris conscience avant, qu’il y avait eu des situations délicates.
Quelques mois plus tard, une collègue, qui m’avait déjà contactée au début de l’été pour monter la future Union des Chefs Opérateurs, m’a parlé d’une soirée organisée par la SRF où quatre professionnelles cheffes de poste étaient interviewées par deux journalistes. Cette soirée a réveillé d’autres prises de conscience. Et le lendemain j’ai été invitée à une soirée de Femmes à la Caméra (qui n’était pas encore le collectif actuel).
Des femmes de l’AFC avaient reçu le même appel des Inrocks sur moi concernant le harcèlement sexuel. Elles s’étaient réunies depuis mars afin d’en discuter, de partager leurs questions.
Ces moments d’échanges entre femmes du métier m’ont fait un bien fou parce que j’ai pu identifier un mal-être, une difficulté d’être/d’exister professionnellement et ainsi la relier à quelque chose qui existe. Ce qui a été très fort pour moi, c’est aussi que j’ai réussi à me présenter d’une manière valorisante. Du fait de l’écoute particulière, mon parcours sinueux a été perçu comme une richesse et a suscité de l’intérêt de la part de plusieurs femmes présentes. C’était pour moi une première. C’est ce qui a fait que j’ai continué à aller chaque mois aux réunions des FALC. C’était très stimulant, ça apportait de la confiance, de la reconnaissance.
Progressivement est née l’envie de créer des événements. Comme nous n’étions pas suffisamment prêtes pour le Micro-Salon en 2019, nous avions fait une apparition très simple : un diaporama de photos, pour trancher avec la représentation qu’on peut se faire des femmes derrière la caméra, place habituellement occupée majoritairement par des hommes, les femmes y restant peu visibles. Le diaporama était diffusé sur les écrans de différents
loueurs.
Qu’avez-vous fait par la suite ?
En septembre 2019 s’est posée la question de la visibilité du collectif, notamment la possibilité de faire une page sur le site de l’AFC, ce qui posait question car une partie d’entre nous ne faisait pas partie de l’AFC. Donc on s’est dit qu’on allait faire un site, mais il fallait pour cela être une entité officielle (entre-temps L’Union des Chefs Opérateurs s’était créée en janvier). Je voyais bien à ce moment-là les premières difficultés que rencontrait cette association; ça commençait à être un peu lourd au niveau de la gestion socio-politique. C’est alors que j’ai proposé aux membres de FALC qu’on adopte le statut de collectif.
C’est comme ça que nous sommes nées de manière presque officielle puisqu’un collectif, c’est plus informel qu’officiel. Entre L’Union des Chefs Opérateurs et le collectif, beaucoup de mon
temps de travail était aspiré, alors que j’étais déjà présidente du Studio Belleville qui travaille plutôt en postproduction sonore. Je faisais aussi différentes interventions en faveur de la formation à l’image.